Les vers se versent en averse

Les vers se versent en averse

Légende des mots

Les mots, un jour, en eurent assez

De servir les hommes, ces vauriens !

Ils n'en pouvaient plus d'être malmenés

Par ces bavards bons à rien !

A l'heure où plus personne n'est réveillé

Tous les mots se réunirent en secret

Dans le cratère d'un volcan endormi

D'abord, toute langue fut convertie

En langue adamique et les mots

S'en trouvèrent très éloquents

Il n'y en avait plus de gros

Ni de creux, ni de fanfarons.

La parole fut donnée à l'alphabet

Il la prit sans manières et dit :

« Nous sommes réunis cette nuit

Pour prendre une grave décision

Depuis que l'homme découvrit

Notre présence, il nous a asservis

Du matin au soir, nous nous plions

A tous ses désirs à toutes ses émotions

Consonnes et voyelles se tissent

En un pont de communication

Nous étions heureux de le servir

Nous le voyions, grâce à nous, reconstruire

La tour de Babel et atteindre le ciel »

Un silence. Un mot chétif s'avance :

« C'est l'enfer que l'homme a atteint !

Sa langue est une vipère dont le venin

Tue sur le champ toute bonne intention

Il sème conflit et discorde en parlant

Il nous utilise pour verser le sang

Et cela serait criminel de continuer à servir

Un maitre qui a le mal pour maitre !

Nous devons partir…»

Une rumeur se fit entendre, le mot chétif

N'avait plus la force de continuer.

« Repose-toi, Amour, tu as le plus souffert

Des hommes ! ils t'utilisaient à tort et à travers ! »

C'était un mot aux lettres enchevêtrées

Illisible, inaudible, à force d'avoir été usé

Qui parla ainsi, on l'écouta avec respect.

« Amour a raison, mais n'oublions pas

Qu'il y a des bienheureux parmi nous

Qui ont habité les gorges des poètes

Des chanteurs et des amoureux fous

Dont la langue s'abreuvait d'élixir… »

Amour ne put s'empêcher de crier :

« Ils sont rares et on se moque d'eux

Ils sont faibles et se taisent

Lorsque les langues de braise

Les marquent de leur feu !

Partons et maintenant ! »

Et ainsi, les mots décidèrent

De s'envoler depuis ce cratère

Vers une autre planète que la Terre

Et, au réveil, l'humanité se trouva muette

Incapable même de parler par écrit

On pensa à une épidémie

Le silence fut insupportable puis on s'y fit !

 

 

 



30/08/2011
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 42 autres membres